Code européen de l’IA : le grand schisme technologique

Les géants technologiques américains adoptent des stratégies diamétralement opposées face au nouveau code de bonnes pratiques européen sur l’intelligence artificielle. Meta se démarque en refusant catégoriquement d’y adhérer.

Le nouveau code européen de bonnes pratiques pour l’intelligence artificielle (IA) divise les géants de la tech. Après l’Américain OpenAI et le Français Mistral, Microsoft se montre favorable à une adhésion.

« Je pense qu’il est probable que nous signions. Nous devons lire les documents« , a déclaré le président Brad Smith à Reuters, saluant « l’engagement direct du Bureau de l’IA avec l’industrie ».

À l’inverse, Meta a choisi la voie de la résistance, refusant toute adhésion à ce guide d’application volontaire à l’IA Act (le Règlement européen sur l’intelligence artificielle). Entré en vigueur en août 2024 après son adoption cinq mois plus tôt, ce texte – le premier du genre –  vise à encadrer horizontalement toute la chaîne de valeur de l’IA.

Le code représente ainsi un outil de facilitation de son application. Il se présente comme « un instrument de « soft law » destiné à guider les acteurs dans la mise en œuvre des exigences de transparence, de respect du droit d’auteur et de gestion des risques systémiques ».

Des « incertitudes juridiques » pointées par Meta

Le code, élaboré par 13 experts indépendants, exige des signataires qu’ils publient des résumés détaillés des contenus utilisés pour entraîner leurs modèles d’IA généraliste et qu’ils mettent en place des politiques strictes de respect du droit d’auteur européen.

Autant de directives qui ne semblent pas agréer Meta. « Meta ne le signera pas. Ce code introduit un certain nombre d’incertitudes juridiques pour les développeurs de modèles, ainsi que des mesures qui vont bien au-delà de la portée de l’AI Act« , a indiqué Joel Kaplan, directeur des affaires mondiales de l’entreprise, dans un billet LinkedIn cinglant posté vendredi 18 juillet.

Le géant fondé par Mark Zuckerberg dénonce une réglementation contre-productive qui handicaperait les entreprises européennes face à leurs concurrents internationaux moins contraints.

La firme californienne fait ainsi écho aux inquiétudes de plus de 40 grandes entreprises européennes, dont Airbus et ASML Holding, qui ont récemment demandé à Bruxelles de suspendre l’application du code, redoutant un frein à l’innovation continentale.

L’Europe face au défi de l’uniformisation technologique

Pour les entreprises d’IA, l’application de la loi représente des coûts supplémentaires de conformité. Et pour celles qui fabriquent des modèles d’IA, les exigences sont plus strictes.

L’attitude de Meta soulève des questions fondamentales sur l’efficacité des mécanismes de régulation volontaire. Si l’une des principales plateformes mondiales peut simplement ignorer ces directives sans conséquence majeures, quelle crédibilité conserve l’arsenal réglementaire européen ?

La situation illustre plus généralement le dilemme auquel fait face l’Union européenne, souvent accusée d’abuser des contraintes réglementaires par rapport aux États-Unis par exemple, dans sa quête de souveraineté numérique.

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