En France, la problématique des algues toxiques au-devant de la scène

Des parlementaires proposent de transformer ces organismes aquatiques en une ressource à exploiter plutôt qu’un fléau à subir, au grand dam des associations militantes.

Et si les algues dites toxiques n’étaient pas que désastre ? Alors que près de 100 000 tonnes de ces organismes photosynthétiques – principalement celles vertes et brunes ou sargasses – s’accumulent chaque année sur les côtes françaises, faisant d’innombrables dégâts (odeurs nauséabondes susceptibles de provoquer la mort, empoisonnement, etc.), certains y voient une opportunité.

Les députés Mickaël Cosson (DEM, Côtes d’Armor) et Olivier Serva (Liot, Guadeloupe) en l’occurrence, suggèrent dans un rapport présenté mercredi 30 avril, d’en faire une ressource potentielle à travers la mise en place d’une industrie de valorisation.

L’idée consisterait notamment à collecter ces algues directement en mer, c’est-à-dire avant qu’elles ne s’échouent et ne commencent à se décomposer. Un timing crucial pour la transformation vertueuse de ces espèces parfois assimilées, à tort, à des plantes.

Une proposition d’autant plus séduisante que le marché mondial de l’algue est en pleine expansion. Estimé à 15 milliards de dollars actuellement, il pourrait atteindre près de 22 milliards de dollars d’ici à 2034, d’après la spécialiste en intelligence de marché, The Business Research Company.

De la nuisance écologique à la ressource valorisable

Parallèlement, la France importe 70 000 tonnes d’algues vertes chaque année, principalement utilisées comme gélifiants et épaississants dans l’industrie alimentaire. Concrètement, il s’agirait selon les deux élus, de mettre à profit des drones, des satellites (pour la localisation des masses d’algues en dérive), de même que des barrages flottants (pour les retenir avant échouage sur les côtes).

Ils proposent également de développer une filière professionnelle, en s’appuyant sur l’expérience des 235 pêcheurs d’algues déjà actifs en Bretagne – une des régions les plus concernées par le fléau –, et d’utiliser des navires spécialement conçus pour les récolter en mer grâce à des pompes embarquées.

Pour les sargasses, le député guadeloupéen envisage la production de biogaz et de biocarburants en les mélangeant avec la bagasse (résidu du broyage de la canne à sucre) et d’autres déchets végétaux.

Un défi économique et environnemental de taille

Les exemples mexicain de fabrication de briques à partir de sargasses et irlandais de fabrication de plastiques biodégradables – peu explorés en France – sont également mis en avant dans le rapport. Reste que ces propositions ne sont pas favorablement accueillies par tous.

Début avril, trois associations de la lutte contre les marées vertes ont fait savoir que « les algues vertes doivent être éliminées à la source et non valorisées ». Une position qui souligne l’importance de s’attaquer aux causes profondes du phénomène – notamment l’agriculture intensive – plutôt que de simplement gérer ses conséquences.

Car la valorisation de ces algues pose d’importants défis techniques. Les sargasses, en particulier, absorbent comme relevé par Le Parisien, toutes les substances présentes en mer et se chargent notamment en arsenic et en chlordécone, un pesticide hautement toxique utilisé aux Antilles jusqu’en 1993.

La question de leur dépollution lors de leur transformation reste donc entière. Les organisations « Sauvegarde du Trégor Goëlo Penthièvre », « Force 5 » et « Défense des victimes des marées vertes » dénoncent par ailleurs une « économie hors sols », « une illusion politique ».

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